Industrie alimentaire, l'indigestion guette

Publié le par COLLECTIF ANTILIBÉRAL du PAYS de PORT-LOUIS



Food, Inc., sur les écrans à partir d’aujourd’hui, est un nouveau documentaire décortiquant les rouages de l’industrie alimentaire. "Quand on va au supermarché, on a l’impression que des milliers de produits sont fabriqués par des milliers de paysans. Mais en réalité, quelques multinationales contrôlent notre alimentation et la variété est très limitée". Entretien exclusif avec son réalisateur, Robert Kenner.

Comment le poids des multinationales influence-t-il les habitudes quotidiennes des consommateurs américains ?

Robert Kenner. Aujourd’hui, quelques entreprises contrôlent notre système alimentaire. Quand on va au supermarché, on a l’impression que des milliers de produits sont fabriqués par des milliers de paysans. Mais en réalité, quelques multinationales contrôlent notre alimentation et la variété est très limitée. Notre alimentation a été profondément modifiée dans les 40 ou 50 dernières années sans que nous nous en rendions compte. Lors du tournage, ma plus grande surprise a été de découvrir tout ce que les fabricants nous cachaient. J’ai assisté à une audience sur la labellisation de la viande clonée (dont j’ignorais l’existence). La représentante de l’industrie de la viande disait qu’un label indiquant l’origine clonée serait trop déroutant pour les consommateurs. J’ai réalisé que ces compagnies lutteraient pour ne pas nous informer sur ce que nous mangeons.

Votre film dévoile les liens entre les multinationales et les organismes de régulation. La nouvelle administration a-t-elle modifié la donne ?

Malheureusement, parmi les personnes qui fixent les règles que doivent respecter les multinationales de l’agro-alimentaire, beaucoup ont travaillé pour ces mêmes multinationales. Il semble que des progrès soient en cours sous cette administration. Food Inc. a été projeté devant la FDA (food and drug administration, en charge de la nourriture et des médicaments NDLR). Washington est beaucoup plus réceptif. Le vote de lois sur la sécurité alimentaire est envisagé. Des rumeurs avancent que le gouvernement prépare des lois anti-trust contre Monsanto. Malheureusement, les subventions pour le maïs et le soja ne vont pas s’arrêter dans les prochaines années.

La France risque-t-elle d’être confrontée aux mêmes problèmes de sécurité alimentaire que les Etats-Unis ?

Je suis persuadé que la nourriture que vous voyez dans Food Inc. est aussi disponible dans les supermarchés français. Le phénomène a commencé aux Etats-Unis mais il s’étend. Smithfield, la compagnie qui produit le porc en Caroline du Nord (dans le plus grand abattoir du monde NDLR) a construit des installations gigantesques en Roumanie où les règles sont moins contraignantes que dans les usines de notre film. Ce porc à bas coût est distribué en Grande-Bretagne et sur le marché européen. Il devient compliqué pour les produits locaux de qualité de concurrencer la nourriture à bas-prix d’autant que les consommateurs ne savent pas ce qu’ils mangent. Je sais que la prise de conscience du danger des OGM est plus forte en Grande-Bretagne et en Europe mais de nombreux aliments contiennent des OGM.

Quels sont les recours du consommateur ?

Dans les supermarchés américains, la plupart des aliments sont produit comme dans les fast-foods. L’efficacité et la compression des coûts priment. Mais ce système n’est pas durable. La production de cette nourriture s’appuie sur le pétrole qui pollue notre eau et détruit les sols. En plus, le système est cruel pour les animaux et pour les travailleurs de ces industries. Nous avons trois bulletins de vote au petit déjeuner, au déjeuner et au dîner. Avec eux, nous pouvons faire en sorte que nos autorités empêchent l’industrie alimentaire de nous priver d’une nourriture équitable de qualité.

Entretien réalisé par Michael Mélinard

Publié dans Santé publique

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article