Logement trêve hivernale

Publié le par COLLECTIF ANTILIBÉRAL du PAYS de PORT-LOUIS

Au printemps, les expulsions refleuriront


La trêve hivernale commence samedi. Court répit qui n’efface pas la réduction du délai aboutissant à l’éviction des locataires en difficulté contenue dans la loi Boutin. Associations, élus et bailleurs sociaux tentent d’enrayer ce phénomène grâce à un accompagnement social renforcé.


Faut-il interdire les expulsions locatives ? Répondez à notre question du jour.

Le droit au logement est un puzzle intéressant. En mars 2007, au terme d’une mobilisation médiatisée des sans-abri sur les rives du canal Saint-Martin, la loi concluait que le « droit à un logement décent » devait être garanti par l’État. Á l’autre bout de la chaîne législative, un cortège de dispositions venait rogner un peu plus ce même droit au logement, couronnant ainsi trois décennies de réformes qui n’ont cessé de limiter le « droit au maintien dans les lieux », selon l’association Droit au logement. En pleine crise économique, les députés de la majorité votaient l’article de la loi Boutin qui prévoit de réduire le délai des expulsions locatives de trois à un an. Dans la foulée, Christine Boutin déclarait que la fin de la trêve hivernale devenait caduque puisqu’il n’y aurait plus aucune expulsion sans proposition de relogement grâce à la mise en place de commissions départementales de prévention des expulsions.

 

Aujourd’hui, les aides financières aux impayés ne suffisent pas à mettre un frein aux expulsions, qui ont connu une forte recrudescence après l’envolée des loyers. De 1994 à 2004, les associations estimaient que 10 % des locataires avaient été l’objet d’un jugement d’expulsion mais, aujourd’hui, elles voient venir à elles de nouveaux publics. En atteste les premiers bilans que la Fondation Abbé-Pierre a dressé de sa plate-forme téléphonique Allô Prévention expulsions. En septembre dernier, soit deux mois après sa mise en service, les lignes saturaient, témoignant de la dégradation des conditions de vie. Certains locataires appellent désormais avant d’avoir franchi la ligne rouge, avant de se retrouver en situation d’impayés. Leur souci est se défendre au mieux pour éviter de se retrouver à la rue, et, pour ce faire, ils sollicitent des conseils juridiques.

 

Si les dossiers relèvent majoritairement du privé, les locataires du parc public ne sont pas épargnés par le phénomène. Les bailleurs sociaux, qui disposent majoritairement de services de contentieux, n’ont pas tous à leur disposition des travailleurs sociaux susceptibles d’accompagner les familles. Une lacune qui laisse particulièrement démunies les familles qui craignent de ne pas pouvoir payer leur loyer à l’avenir, ou celles, en fin de procédure, qui prennent tardivement conscience de l’imminence de leur expulsion. La majeure partie de ces personnes restent ignorantes des recours juridiques ou sociaux.

 

Avant l’été, une vingtaine d’organisations, parmi lesquelles la CNL, le DAL, la Fondation Abbé-Pierre ou le Syndicat de la magistrature, lançaient le réseau Stop aux expulsions de logement. Elles rappelaient qu’en pleine crise sociale, « on a vu des locataires attenter à leurs jours plutôt que de perdre leur logement ». Et demandaient sans délai un moratoire sur les expulsions à l’heure où 500 000 familles étaient en situation d’impayés. La mairie de Gennevilliers qui, comme de nombreuses autres, prend depuis quelques années des arrêtés anti-expulsions, faisait remarquer à Christine Boutin que la baisse du coût du logement dans le budget des ménages était inconcevable sans la construction de logements sociaux dans toutes les communes. Et les efforts mis en place pour accompagner les familles, notamment via des fonds locaux de solidarité logement, ne sauraient « colmater les insuffisances d’une politique nationale du droit au logement pour tous ».

Lina Sankari

L'Humanité



Publié dans Actualités : Social

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