L'après régionales :

Publié le par COLLECTIF ANTILIBÉRAL du PAYS de PORT-LOUIS

ligne de fracture entre Cohn-Bendit et Duflot ?

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A l'occasion de la première grande plénière des journées d'été des Verts, Daniel Cohn-Bendit a jeté un pavé dans la mare en évoquant l'alliance avec le Modem, contredisant la démarche de Cécile Duflot, désireuse de structurer les mouvements de gauche en vue des régionales.


De gauche à droite : Cécile Duflot, Daniel Cohn-Bendit et Emmanuelle Cosse à la plénière du jeudi 20 août (photo : SL)
De gauche à droite : Cécile Duflot, Daniel Cohn-Bendit et Emmanuelle Cosse à la plénière du jeudi 20 août (photo : SL)

"Merde ! Il faut changer la gauche et défier la droite. Et s'il faut ajouter le Modem, on ajoutera le Modem, tempête Daniel Cohn-Bendit à la tribune de l'amphi A5 de la cité Vauban plein comme un œuf, ce jeudi 20 août, de sympathisants Europe écologie. Vous voulez une majorité ou vous voulez avoir raison ?» La formule fait bientôt craquer l'air d'applaudissements, accompagnés de rires, amusés par le coup de sang de «Dany". Cécile Duflot, elle, ne rigole pas du tout.

Pour cette première plénière portant sur «le rassemblement des écologistes», elle avait convié, en plus des stars de la campagne, Christiane Taubira, Emmanuelle Cosse (co-rédactrice en chef de la revue d'extrême gauche Regards) et Eric Loiselet, chef de la mouvance écologiste du PS. Chacun y était allé de son discours enthousiaste sur Europe écologie, émettant une réserve timide sur l'entrée dans un mouvement présenté par tous comme le lieu d'une refondation de la gauche. Et, vers 22 heures 30, alors que la salle tremblait d'impatience, Dany a tout envoyé balader.

Daniel Cohn-Bendit : «vous voulez la majorité ou vous voulez avoir raison?»

Prenant la parole à sa suite, Cécile Duflot corrige ouvertement le porte drapeau d'Europe écologie : «il ne faut pas seulement avoir la majorité.» La secrétaire nationale des Verts serre les dents : «je suis d'accord avec l'essentiel de ce qu'a dit Dany.» La nuance fait très mal : Cohn-Bendit est plié en deux sur sa chaise, remue entre ses mains la tête d'un «non» interminable. Mais la secrétaire nationale se devait de marquer son désaccord, ne serait-ce que pour rassurer les militants Verts : depuis le ralliement de Yann Wehrling et Jean-Luc Benhamias à François Bayrou, le Modem est synonyme de trahison pour le parti écologiste.

Le tour de parole reprend dans un malaise : Emmanuelle Cosse exprime son inquiétude quant à «cette envie d'être majoritaire» de Daniel Cohn-Bendit : «c'est bien beau cette question d'alliance mais...» Mais l'ancienne présidente d'Act Up, venue parler d'union sacrée entre société civile et partis progressistes, s'est vu servir un panégyrique de Bayrou et un opportunisme sans grand rapport avec la démonstration de Cécile Duflot en ouverture, démontrant par A plus B la filiation «génétique» du projet Europe écologie avec la gauche.

Cécile Duflot : «qu'est-ce qu'on fera en 2012? J'en sais rien!»

Se défaussant sur l'animateur, Edwy Plenel, Cohn-Bendit tente de tirer un sourire à la tribune : «moi, on m'a demandé comment battre Sarkozy : je suis un garçon poli, je réponds aux questions qu'on me pose.» La salle rigole un peu mais Cécile Duflot est effondrée : la patronne des Verts peine à regarder Dany plus de quelques secondes, trifouille dans son sac et, la conférence finie, se faufile jusqu'à la sortie, sans s'attarder devant les caméras qui assaillent Christiane Taubira.

Entre Cohn-Bendit et Duflot, la rupture est de deux ans : le premier pense à 2012, la seconde vise 2010. «Qu'est-ce qu'on fera en 2012 ? J'en sais rien, vous non plus ! Lançait la secrétaire nationale des Verts à la tribune avant de reformuler la doctrine déjà esquissée à l'Ecologie Day de Saint-Ouen le 4 juillet : personne ne va rejoindre personne. Ce que je vous demande, c'est faisons ensemble !»

Alors qu'Europe écologie prépare sa campagne des élections régionales en misant tout sur la crédibilité de son pouvoir et «l'imaginaire d'une victoire possible de l'alternative écologiste», comme le formulait Yannick Jadot, la sortie de Dany fait tâche : «il faudra aussi gérer les régions dans toutes leurs contradictions», a-t-il tenté de se rattraper dans sa deuxième intervention, très peu applaudie.

L'après régionales : un tabou

«L'après-régionales, c'est le sujet tabou : personne n'a envie de s'interroger dessus parce qu'on sait que les lignes de fractures sont nettes» avoue un participant à la campagne européenne dans la cour. Des militants continuent de débattre sur l'accrochage entre les deux têtes jusqu'au portail de la cité Vauban : «tant qu'on parle de réseau, Europe écologie fonctionne très bien, analyse une militante parisienne. Mais dès qu'on envisage la nomination d'une personne ou même l'élection présidentielle, ça ne marche plus : c'est la  grande faille du mouvement !» Pour l'instant, le désaccord n'est qu'une affaire de personne. Encore faut-il que la séparation ne se creuse pas au milieu du mouvement.

Sylvain Lapoix - Marianne (envoyé spécial) | Vendredi 21 Août 2009 à 12:25


Publié dans Politique

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