La République, le Prince, et les IUFM

Publié le par COLLECTIF ANTILIBÉRAL du PAYS de PORT-LOUIS

L’auteur, dont la signature est un pseudo, adresse à « Main basse sur l’Ecole publique » quelques strophes en pastiche de vers classiques sur le mode de l'humour.

Il replace l'actuelle tentative de liquidation de la formation des enseignants à travers celle des IUFM dans le cadre de l'agression généralisée contre l'Ecole publique dont « Main basse sur l’Ecole publique » est « l'un des dénonciateurs les plus écoutés et les plus lus. »

 

 

Pour mieux venir à bout de cette République,

Il fallait saboter son École publique,

Démolir ses valeurs héritées des Lumières,

Et pour y parvenir, la rendre impopulaire.

 

Les conseillers du Prince, inspirés par les muses,

Ont jugé très malin d’attaquer par la ruse.

Ils l’ont persuadé de s’offrir la gloriole

De rendre incompétents les maîtres des écoles.

 

« Empêchons-les d’abord d’apprendre leur métier.

Ils deviendront mauvais et l’on va s’en méfier. »

Disaient-ils en pensant que les parents inquiets

À l’école privée inscriraient leurs mouflets.

 

Libéraux fanatiques, ils voulaient en découdre

Avec le camp laïque, et le réduire en poudre.

Quelques républicains, pourtant fort convaincus,

Firent une alliance avec ces trous du cul.

 

Trompés par les discours des faiseurs de ragots,

Ils avaient en horreur le camp des pédagos,

Et les IUFM, ces temples du laxisme,

Des Sciences de l’Éduc et du pédagogisme.

 

Bassement motivés par de vieilles rancunes,

Ressassant sans arrêt d’anciennes infortunes,

D’autres se sont levés et grossirent les rangs

Du troupeau bigarré toujours vociférant :

 

A bas les pédagos, mort aux IUFM !

Les hôtes du Palais, reprenant l’anathème,

Allaient incontinent, par une ruse oblique,

Porter un rude coup à l’école publique.

 

Le Prince dépêcha ses meilleurs courtisans.

D’abord un Duc du sud, d’un genre suffisant.

Connaisseur du sérail, il avait la dent dure,

Et mit l’IUFM en fâcheuse posture.

 

En allongeant le temps des études coûteuses,

Au grand dam des enfants des classes laborieuses,

Dont les représentants restèrent sans riposte,

Il économisa quelques milliers de postes.

 

Il répandait déjà en d’autres ministères

Son venin libéral aux effets délétères

Quand un miraculeux scrutin périgourdin

L’étendit sur le sol comme un coup de gourdin.

 

Quant aux IUFM, une grande Duchesse

Des universités, assez jolie gonzesse,

Abandonnant l’idée de les karchériser,

Entreprit le chantier de les masteriser.

 

On espérait ainsi les noyer en douceur,

Contourner le rempart de leurs vieux défenseurs.

Le plan a fonctionné pour le second degré

Qui dans les UFR se vit désintégré.

 

Il en fut autrement pour l’école primaire

Qui n’intéressait pas les universitaires.

On créa des masters, avec bien des lacunes,

D’une vraie formation, substituts de fortune.

 

Et les IUFM dans l’université

Survécurent ainsi à tant d’adversité

En économisant la chaleur animale,

Comme un lointain reflet des Écoles normales.

 

Un marquis de Champagne, un fidèle du Prince,

Ordonna aux vassaux qui servent en province

De répandre le bruit que les IUFM,

Moribonds en sursis, n’étaient plus un problème.

 

Mais les étudiants, race fort peu docile,

Firent fi en riant des rumeurs imbéciles.

Ils viennent se former dans les nouveaux masters

Et préparer ainsi leur futur magistère.

 

Pire encore, étonnant, les universités,

Au camp des pédagos, donnent droit de cité.

Le ver est dans le fruit. Le Prince le sait-il ?

Saura-t-il l’attirer dans un piège subtil ?

  

En aura-t-il le temps avant que l’électeur

N’étende sur la France un vote protecteur

En la débarrassant du Prince anti-laïque,

Et sauve in extremis son École publique ?

 

Jean Constant

2010

 


 

 


 

Publié dans École publique

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article